Décidément, le progrès est une arme redoutable dans bien des domaines. Notamment dans celui de la vidéosurveillance. C’est grâce à son installation qu’un dentiste de la rue Saint-Jean, à Nancy, a pu mettre un visage sur celle qui lui a dérobé sa sacoche, mardi après-midi, « alors même que je soignais une personne dans la pièce à côté. Celle-ci contenait des chèques de patients libellés à mon nom, 1.000 euros en liquide et des papiers professionnels type factures, Urssaf, CPAM, etc. Si l’un d’entre vous la reconnaît je vous serais infiniment reconnaissant de m’en faire part via Facebook ou Messenger », explique-t-il sur son compte.
Sur la vidéo postée sur son mur, on distingue nettement le petit manège. Toute de noir vêtue, bottines sombres aux pieds, foulard noir sur la tête, lunettes imposantes sur le nez, sacoche en bandoulière, la femme, que le praticien n’a pas reconnue comme étant une de ses patientes, pénètre dans le cabinet et s’accoude au comptoir, près de l’aquarium, attendant vraisemblablement une secrétaire. Les secondes défilent et pendant ce temps, elle observe nerveusement autour d’elle. Le canapé rouge et la salle d’attente sont vides… Mais elle ne remarque pas la caméra qui la filme depuis le début. L’indélicate passe alors derrière le guichet puis ressort pour assurer le coup avant de repasser derrière et de prendre la poudre d’escampette, d’un pas pressé, la fameuse sacoche brune à la main. Sur Facebook, les réactions se sont multipliées, certaines en messages privés… Peut-être le début d’une piste.
« Si l’un d’entre vous la reconnaît, je vous serais infiniment reconnaissant de m’en faire part via Facebook ou Messenger », avançait le dentiste.
La suspecte, une Nancéienne âgée de 52 ans, a effectivement été identifiée. Elle s’est présentée d’elle-même ce vendredi matin à l’Hôtel de police du boulevard Lobau. Elle a été entendue en audition simple par un enquêteur de la Brigade criminelle de la Sûreté départementale. « Je regrette mon geste. Je l’ai fait sur un coup de tête, par opportunité et par besoin », explique cette femme de ménage qui enchaîne les petits CDD.
« Je suis passée devant ce cabinet par hasard, j’avais besoin de prendre rendez-vous pour des soins. Il n’y avait personne à l’accueil et j’ai vu cette sacoche… Je m’en suis débarrassée un peu plus loin mais je n’ai rien pris à l’intérieur, il n’y avait pas d’argent liquide», assure-t-elle.
Soutenue par ses deux filles, la quinquagénaire a décidé de se retourner contre le dentiste qui a diffusé la vidéo sur le réseau social.
« Cette diffusion est illégale et cruelle », jugent la suspecte et ses deux filles. « Cela revient à se faire justice soi-même. Etre victime ne confère pas tous les droits sinon c’est le chaos ! »
Leur avocat s’apprête à déposer plainte auprès du procureur de la République pour « atteinte à la présomption d’innocence et atteinte à la vie privée ». « Car le dentiste ne pouvait prendre une telle initiative sans flouter le visage de la suspecte et encore moins sans l’aval des autorités », estime Me Kéré.
A l’issue de son audition par la police et sur instruction du Parquet, la voleuse de sacoche fera l’objet d’une procédure en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), le 31 mai. Contacté, le dentiste n’a pas encore donné suite.