Les implants dentaires échouent à un taux 10 fois supérieur à celui des dents naturelles chez les patients atteints de parodontite chronique traitée

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Les implants dentaires sont un traitement couramment utilisé pour remplacer les dents existantes et manquantes. Le taux de survie à long terme des implants dentaires est bien documenté dans la littérature. La rétention à long terme des dents chez les patients présentant une perte osseuse modérée à avancée, qui sont traités par thérapie parodontale et inscrits à des programmes d’entretien parodontal, donne des taux de réussite à long terme similaires ou plus élevés.

Une étude récente comparant les taux de rétention entre les implants dentaires et les dents naturelles sur 10 ans ou plus chez des patients ayant des antécédents de maladie parodontale chronique a révélé que les implants dentaires étaient perdus à un taux 10 fois supérieur à celui des dents naturelles perdues en raison d’une maladie parodontale. Avec la popularité croissante des extractions buccales complètes et du remplacement par des prothèses implanto-portées au lieu d’une thérapie parodontale préservant les dents, la sélection du cas doit être envisagée avant le traitement implantaire.

Le taux de survie à long terme des implants dentaires est bien documenté dans la littérature 1 et constitue une méthode de traitement largement mise en œuvre dans les cabinets dentaires généralistes. De même, la rétention des dents traitées parodontale avec une perte osseuse modérée à avancée a des taux de réussite à long terme similaires à plus élevés. 2 Même les dents naturelles souffrant d’une perte osseuse avancée avec un pronostic réservé à mauvais et traitées avec un traitement initial, chirurgical et de soutien ont des taux de réussite à long terme élevés dans la littérature. 3,4 La littérature a également montré que les patients qui adhèrent à des rendez-vous d’hygiène stricts combinés à des soins à domicile diligents peuvent empêcher la progression des maladies parodontales et entretenir leurs dents sur une longue période de temps. 5

Radiographie d’un patient qui souffrait d’une maladie parodontale chronique et dont toutes les dents ont été remplacées par des implants. Le patient souffre maintenant d’une péri-implantite avancée.

Analyse de l’étude rétrospective

Une étude rétrospective récente avec un suivi de 10 ans a évalué les taux de survie à long terme des dents naturelles par rapport aux implants dentaires chez 58 patients qui ont été traités pour une maladie parodontale chronique puis inscrits à des programmes de maintenance parodontale. 6 L’étude a révélé que sur 10 ans, la perte totale des dents naturelles (due à des caries, à des raisons endodontiques et/ou à des raisons parodontales) était de 0,07 dent par patient et par an et de 0,04 dent par patient et par an pour des raisons parodontales.

D’autre part, la perte d’implants dentaires était 10 fois plus élevée, à 0,4 implants perdus par patient et par an. Quatre-vingt-dix pour cent des dents altérées parodontales traitées avec un traitement parodontal actif (c.-à-d. détartrage/surfaçage radiculaire, chirurgie, entretien parodontal) ont survécu au cours de la période de 10 ans de l’étude. De plus, les dents désignées avec des pronostics douteux au départ ont diminué de 1,9%, tandis que les dents attribuées avec de bons pronostics ont augmenté de 3,6%. La survie globale des implants dans cette population d’étude était de 90 %, avec 100 % des implants survivant jusqu’à cinq ans, puis échouant à un taux de 10,08 % dans la plage de six à 10 ans.

Les résultats de cette étude concordent avec d’autres études suggérant que les patients ayant des antécédents de maladie parodontale sont plus susceptibles d’échec de l’implant sur une période prolongée en fonction, probablement en raison d’une dysbiose bactérienne associée à des augmentations de la production de cytokines, telles que l’interleukine-1, l’interleukine- 6, facteur de nécrose tumorale alpha et bêta. Cette combinaison pathogène peut conduire à de multiples épisodes de péri-implantite au fil du temps avec un échec implantaire potentiel. 7

Une autre découverte intéressante de l’étude était qu’au cours de la période de suivi de 10 ans, les implants avec une profondeur de sondage de six ou plus et une perte osseuse de 50 % ou plus ont augmenté de 13,5% et 3,1%, respectivement, tandis que les dents naturelles ont diminué de 8% et 10,7 %, respectivement. Cela suggérerait que le pronostic dentaire a augmenté au cours de la période d’étude, tandis que le pronostic des implants a diminué. De plus, les patients avec des profondeurs de sondage de cinq ou plus et/ou des scores de saignement buccal complet de 25 % ou plus présentaient un risque significativement accru de maladie péri-implantaire, soulignant l’importance de contrôler la maladie parodontale chez les patients candidats à un traitement implantaire. 8

Les auteurs de cette étude déclarent : Il est généralement admis que les dents dont le pronostic est défavorable ne doivent pas être traitées parodontale car le pronostic d’une thérapie complexe peut ne pas correspondre aux niveaux élevés de succès du traitement implantaire. La littérature ne supporte pas cette croyance et a indiqué que le traitement parodontal combiné avec la thérapie d’entretien des dents compromises offre des niveaux élevés de succès. 9

Historiquement, on pensait que chez un patient atteint d’une maladie parodontale, une fois les dents retirées et le traitement implantaire initié, les agents pathogènes qui causaient la perte des dents parodontales seraient éliminés et n’affecteraient donc pas l’implant dentaire. 10 La littérature plus récente a suggéré que cela est inexact, et les patients atteints d’une maladie parodontale chronique ou agressive peuvent souffrir de complications plus biologiques avec la thérapie implantaire. 11

Un article historique qui vient d’être publié qui évalue la difficulté d’éliminer les agents pathogènes parodontaux de la bouche déclare : Le repeuplement des poches parodontales traitées par des agents pathogènes microbiens peut également provenir de plusieurs réservoirs oraux, notamment l’épithélium et la lamina propria de la paroi de la poche et l’épithélium de la muqueuse buccale , le dos de la langue, les cryptes amygdaliennes et la salive. 12

L’une des implications de cet article serait qu’une fois les dents altérées parodontalement extraites, les surfaces des implants dentaires peuvent être colonisées par des agents pathogènes parodontaux potentiellement pathogènes sans un contrôle adéquat du biofilm dans l’environnement buccal global. Cela s’appliquerait même dans les cas d’extraction buccale complète avec un traitement implantaire immédiat ou retardé.

Décider du traitement

En conclusion, au moment de décider entre la sauvegarde de la dentition naturelle et l’extraction et la pose d’implants, de nombreux facteurs doivent être pris en compte. En plus des taux de réussite à long terme, le praticien et le patient doivent évaluer l’ impact économique à long terme que le patient devra endurer. Avec l’adoption universelle des extractions buccales complètes et du traitement ultérieur avec des solutions d’arcade complètes soutenues par des implants, la volonté d’extraire des dents pouvant être récupérées avec un traitement parodontal s’est accrue. Les implants dentaires et la thérapie parodontale pour sauver les dents naturelles ont des taux de réussite initiaux élevés ; cependant, les dents naturelles présentent souvent moins de complications au fil du temps et ont moins d’impact financier lorsqu’une correction est nécessaire. 13

Note de l’éditeur : cet article a été publié à l’origine dans Perio-Implant Advisory

la source en Anglais est  : https://www.perioimplantadvisory.com/clinical-tips/article/14200690/dental-implants-fail-at-a-rate-10-times-that-of-natural-teeth-in-patients-with-treated-chronic-periodontitis-new-study

 

References

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  2. Levin L, Halperin-Sternfeld M. Tooth preservation or implant placement: a systematic review of long-term tooth and implant survival rates. J Am Dent Assoc. 2013;144(10):1119-1133. doi:10.14219/jada.archive.2013.0030
  3. Setzer F, Syngcuk K. Preserving the natural tooth versus extraction and implant placement: an evidence-based approach. In: Rosen E, Nemcovsky CE, Tsesis I, eds. Evidence-Based Decision Making in Dentistry. Springer; 2017:73-95. doi:10.1007/978-3-319-45733-8_6
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