Dans un éditorial publié sur le site de la Caisse de retraite des chirurgiens-dentistes le 4 février, Frank Lefèvre, son président, tire le bilan de deux années de concertations avec les pouvoirs publics sur la mise en place du régime de retraite universel par points. Et le moins que l’on puisse dire c’est que pour lui, ce bilan, justement, n’est pas glorieux.
Sur le fond ? « Rien de significatif, l’État prenant en main l’ensemble du système et faisant bien disparaître à terme tous les régimes de retraite autres que le régime universel ».
Sur la forme ? « Une usine à gaz et un choc de complexification doublés d’un choc d’illisibilité (…) Rien sur le périmètre, rien sur la gouvernance, rien sur une quelconque autonomie ». Quant à la procédure accélérée devant le Parlement et le renvoi à de très nombreux décrets et ordonnances (le projet de loi est en cours d’examen par une « Commission spéciale » chargée d’examiner le projet de loi), ils « n’augurent pas d’une possibilité future d’influer en quoi que ce soit sur cette réforme, mais témoignent d’une volonté de passage en force du Président de la République et de son Gouvernement ». Fermez le ban…
Selon Frank Lefèvre, le projet est devenu « illisible » pour les professions libérales avec la création de deux taux de cotisation pour les indépendants, le premier à 28,12 % jusqu’à 1 PASS (Plafond annuel de la Sécurité sociale) et le second à 12,94 % entre 1 et 3 PASS, « créant de facto deux sortes de professionnels libéraux : ceux qui gagnent moins de 40 000 euros et ceux qui gagnent plus ».
Fin 2040, tous les libéraux cotiseront à la même caisse que tous les Français
Autre écueil : la modification de l’assiette de cotisation retraite. Elle serait définie comme « l’équivalent d’une assiette brute (BNC + cotisation Madelin + cotisations maladie + cotisation allocations familiales) calculée à partir d’un abattement forfaitaire appliqué au revenu déclaré. L’abattement serait de 30 % et mettrait fin à la surpondération de la CSG qui est calculée sur une assiette plus large que celle des salariés et dans laquelle sont réintégrées les cotisations sociales dues ». Pas très clair en effet… « Je pressens que beaucoup sont déjà en train de renoncer à bien en appréhender la signification et je les comprends », s’amuse d’ailleurs Frank Lefèvre.
Il faut retenir qu’après une période de transition au maximum de 15 ans, fin 2040, tous les professionnels libéraux cotiseront à la même caisse de retraite que tous les Français, sur la même assiette, avec les mêmes seuils et avec les mêmes taux jusqu’à 1 PASS. Si la Caisse ne disparaîtra pas elle ne « gérera plus en 2025 que les retraités actuels et la totalité des cotisants nés avant 1975, plus ceux nés après 1975 pour la part qu’ils auront cotisée avant 2025 ». Pour lui permettre de pouvoir honorer ses engagements, elle recevra dotation pour compenser ce qu’elle ne percevra plus des affiliés rentrant dans le régime universel.
Enfin, si Frank Lefèvre confirme que le Président de la République et le gouvernement ont bien dit que les réserves constituées appartenaient aux caisses de retraite et aux professions les ayant constituées, « encore faudrait-il que le projet de loi le formalise et garantisse l’utilisation des réserves au bénéfice des affiliés de leurs régimes respectifs, ce qui n’est pas le cas ».