Dans une étude commandée par Matignon, le Conseil d’Etat recommande de lever l’interdiction générale de publicité qui pèse sur les infirmiers, médecins, kinésithérapeutes, sages-femmes et dentistes.
Les infirmiers, médecins, kinésithérapeutes, sages-femmes et dentistes pourront-ils demain vanter leur expérience et détailler leurs pratiques professionnelles sur leur site Web ou dans des brochures papier ? Oui, si l’interdiction générale de publicité directe ou indirecte des professionnels de santé est supprimée du Code de la santé publique. C’est la recommandation que vient de formuler le Conseil d’Etat et elle a de fortes chances d’être suivie.
L’institution avait été saisie par Matignon en décembre. L’objectif était d’étudier comment se mettre en conformité avec la jurisprudence européenne récente. Dans une affaire de dentistes belges, la Cour de Luxembourg a en effet considéré que la prohibition absolue de la publicité n’était pas compatible avec la directive services électroniques.
« Un droit à donner des informations »
Le Conseil d’Etat aurait pu suggérer d’aménager le système français à la marge, mais il a choisi une voie plus audacieuse, explique son vice-président Bruno Lasserre : « Nous proposons un renversement de perspective, en levant l’interdiction générale, et en posant un droit à donner des informations ».
Les magistrats ont voulu aller plus loin pour répondre à de nouvelles exigences. D’abord, les patients veulent être mieux informés, car actuellement, il faut être initié pour bien s’orienter dans le système de soins. Ensuite, ils ont besoin d’un contrepoids aux informations erronées ou sectaires qui circulent sur le Web. Enfin, les professions réglementées souffrent de la concurrence d’acteurs non régulés qui ont, eux, le droit de communiquer – par exemple, les cliniques dentaires en Hongrie ou les ostéopathes en France.
Communiquer « avec tact et mesure »
Pour élaborer ses propositions, le Conseil d’Etat s’est inspiré du cas des vétérinaires, qui ont le droit de faire de la publicité depuis 2015. Le principe de libre communication au public a été adopté, sous réserve du respect des obligations déontologiques : l’information doit rester loyale, honnête, désintéressée et il demeure interdit au professionnel de faire figurer les avis de tierces personnes sur son propre site Web.
- Les garde-fous seront encore plus sévères si l’on soigne des êtres humains. Il est défendu à un médecin d’exercer sa profession « comme un commerce » : il devra donc garder « tact et mesure » en communiquant. Pas question d’affiches grand format dans la rue, de spots télé, de publicité comparative ou de placarder son annonce devant un cabinet concurrent. Même le référencement payant sur Internet devrait être proscrit, puisqu’il permet de se retrouver en tête de page dans les requêtes Google.
Diffuser les tarifs dès la prise de rendez-vous
Au-delà de la libre communication, le Conseil d’Etat propose de rendre obligatoire la diffusion des tarifs dès la prise du premier rendez-vous, par téléphone ou en ligne. Ces informations économiques sont affichées dans les salles d’attente, mais les patients tombent dessus trop tard. Quant aux professionnels libéraux venus d’autres pays européens, ils seraient contraints de communiquer aux patients la liste des actes qu’ils ont été habilités à effectuer.
https://www.lesechos.fr/economie-france/social/0301850729273-professions-de-sante-vers-la-fin-de-linterdiction-de-publicite-2186019.php